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Musée, colonisation, et restitution

El Hadji Malick Ndiaye

Quand les bases modernes du musée sont jetées au XVIIIe siècle, le souci
de classification méthodique des savoirs par le biais des objets est venu à
travers les grands catalogues du XVIe siècle et les cabinets de curiosité,
sorte de miroir du monde en réduction. La sécularisation opérée par le
musée prive les objets d’autels de leur dimension sacrée. Tirés de leur
contexte rituel, ils sont des objets d’art qui témoignent d’un génie natio-
nal. Exposés au musée, ils conquièrent une épaisseur universelle. Le dé-
veloppement du musée est inscrit dans une histoire intellectuelle et cultu-
relle de la modernité qui a subi de profondes transformations et dont la
relecture est un défi posé aux dispositifs muséographiques. En Afrique
de l’Ouest, plusieurs musées sont créés sur les ruines des collections colo-
niales au sein de structures dont la croissance fait appel à des protocoles
de patrimonialisation à géométrie variable (vgl. Malick Ndiaye 2007).
On comprend donc que la question de la restitution advient par le biais
d’une double échelle politique et scientifique. Depuis quelques mois, An
ne compte plus le nombre de rencontres qui prennent cette thématique
comme objet. Chaque institution se doit de mettre cette question sur la
table. La restitution semble tomber dans le glamour des débats d’idées
qui sont à la mode. Cette situation conduit à une réflexion scientifique
dont le calendrier est dicté par le rythme de l’agenda politique. Compte
tenu de cette réalité, il est important de considérer d’abord l’histoire à la
suite de laquelle l’appel du président Macron doit être resitué. Ensuite il
s’agira d’identifier les enjeux liés au contexte actuel de la restitution.

LES CHEMINS DE LA RESTITUTION
La restitution du patrimoine et la nouvelle muséologie ont pris une di-
mension institutionnelle presque dans la même période, en l’occurrence
les années 1970. Le croisement de quelques faits structurants démontre
la nécessité de cette lecture historique. En 1971, la section française du
Conseil International des Musées (ICOM) organise une rencontre sur
«Le musée au service de l’homme aujourd’hui et demain: le rôle éducatif
et culturel du musée». Au cours de ce débat, Stanislas Adotévi appelait à
une prise de conscience radicale ainsi qu’au rejet d’une culture colonia-
liste des musées africains (Mairesse 2000: 42). Un processus était amorcé
dans lequel les deux directeurs successifs de l’ICOM (Georges Henri
Rivière et Hugues de Varine) joueront un rôle capital. De nouvelles ex-
périences sont tentées à travers le monde dans un cadre où se développe
le concept d’écomusée. Ce nouveau paradigme prend en compte l’étroite
relation entre le musée et la société dont la Déclaration de Santiago du
Chili (1972) servira de mémorandum. Il s’agit dorénavant d’être plus
attentif à cette institution culturelle et au rôle qu’il doit jouer pour la
communauté.

El Hadji Malick Ndiaye is currently a researcher at IFAN/Ch. A.
Diop (Cheikh Anta Diop University in Dakar), curator of the Musée
Théodore Monod d’art africain, and secretary general of ICOM/Senegal.
As a member of the steering committee of the 2018 edition of the Bien-
nale d’art africain contemporain, he headed its Commission Rencontres
et échanges. He teaches art history and cultural heritage, collaborates
with several journals, and participates in various international scientific
Aktivitäten. A theorist and curator, his publications focus on modern/
contemporary art and global history, cultural policies, and African
museum institutions. mlkopictura@yahoo.fr

This issue’s First Word on the subject of restitution has three parts: Die
essay by El Hadji Malick Ndiaye appears in both the French original
and in translation, which are printed here side by side, während die
essay on the topic by John Warne Monroe (who is also the translator
of Ndiaye’s essay) follows. This presentation is part of an ongoing
conversation among the African Arts editorial consortium about how
to incorporate input in languages other than English in a polyglot aca-
demic discipline. We hope this will be an evolving project and welcome
reader input on how to incorporate multilingual contributions within
the constraints of modern publishing.

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The Museum, Colonization, and Restitution

El Hadji Malick Ndiaye
translated by John Warne Monroe

When the modern museum took shape in the eighteenth century, its
preoccupation with the systematic classification of knowledge by means
of objects was derived from the great catalogues of the sixteenth century
and from cabinets of curiosities, which aimed to be reflections of the
world in miniature. The museum secularized the religious objects it
contained, stripping them of their sacred dimension. Divorced from
their ritual contexts, they became art objects seen as manifestations of
a nation’s creative spirit. Exhibited in the museum, these objects also
came to acquire a universal dimension. The development of the museum
is part and parcel of an intellectual and cultural history of modernity;
reinterpreting that history in light of the profound changes it has entailed
is therefore a challenge to the whole museological system. In West
Africa, several museums have been established on the ruins of colonial
collections, within structures that, as they have expanded, have required
highly adjustable rules for the designation of heritage (see Malick Ndiaye
2007). It is therefore clear that the question of restitution must be consid-
ered in both political and scientific terms. Over the last several months,
countless meetings have been devoted to this problem. Every institution
has been obliged to put the question on the table. Restitution has become
a fashionable topic for intellectual debate. Given this state of affairs, any
scientific reflection must unfold according to the timetable established
by political agendas. Bearing this reality in mind, it is important to begin
with some attention to the historical background of President Macron’s
initiative. Dann, the task will be to identify what is at stake in the current
context in which restitution will occur.

PATHS TO RESTITUTION
Heritage restitution and the new museology both took on an insti-
tutional dimension over the course of the 1970s. Several intersecting
historical factors structured this development. In 1971, the French
section of the International Council of Museums (ICOM) organized
a conference called The Museum in the Service of Man Today and
Tomorrow: The Educational and Cultural Role of the Museum. Während
this event, Stanislas Adotévi called for a radical new consciousness and
for the rejection of a colonialist culture of African museums (Mairesse
2000: 42). This began a process in which two successive directors of
ICOM, Georges Henri Rivière and Hugues de Varine, would play key
roles. Across the world, various experiments led to the emergence of
the concept of the ecomuseum, a new paradigm built on the principle,
outlined in the Declaration of Santiago de Chile (1972), that a museum

VOL. 52, NEIN. 3 HERBST 2019 afrikanische Kunst | 1

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En 1976, l’Unesco organise une rencontre à Venise où la question de
la restitution est étudiée par des experts qui suggèrent la création d’un
Comité chargé de faciliter le retour ou la restitution du patrimoine. Le
7 juin 1978, le Directeur de l’Unesco, le sénégalais Amadou Makhtar
Mbow, prononçait son discours mémorable «pour le retour à ceux qui
l’ont créé d’un patrimoine culturel irremplaçable». Quelques mois plus
tard, (Paris, 24 octobre–28 novembre), à l’occasion de la 20e session de
sa Conférence générale, l’Unesco crée par la résolution 20 C4/7.6/5 le
«Comité intergouvernemental pour la promotion du retour de biens
culturels à leur pays d’origine ou de leur restitution en cas d’appropriation
illégale». Une étude sera confiée à l’ICOM sur les principales difficultés
ainsi que les solutions qu’impliquent la restitution ou le retour de biens
culturels perdus en raison du fait colonial ou de l’occupation étrangère.

Bien qu’étant pour la restitution du patrimoine, cette étude introduisait
des réserves à trois niveaux. D’abord, elle mettait en garde sur l’obsession
du chef-d’œuvre dont l’appréciation est incertaine et transitoire et la
valeur trop souvent étroitement esthétique et parfois même plus mar-
chande que culturelle (ICOM 1979: 2, Punkt 12). Ensuite elle remettait en
question l’appartenance de l’objet à telle ou telle culture en se basant sur le
fait qu’il existe des chefs-d’œuvre réemployés par plusieurs cultures suc-
cessives de sorte que leur attribution en devienne difficile. C’est l’exemple
des «obélisques de Rome ou les vases chinois réutilisés par les artistes du
XVIIIe ou encore la profonde influence de l’art africain sur les techniques
picturales au XXe siècle» (ICOM 1979: 2, Punkt 12). Enfin, cette dénatio-
nalisation de l’objet était assujettie à une déterritorialisation de celui-ci
vis-à-vis de son pays d’origine suite aux modifications des frontières. Une
question certes complexe quand on se souvient de la demande formulée
par Alex Salmond, alors chef du Parti national écossais préconisant le
retour des pièces d’échecs Lewis du British Museum qui auraient été fa-
briquées en Norvège, mais fouillées dans la baie de Uig, sur l’île de Lewis,
dans les Hébrides extérieures d’Ecosse (Thomas 20016: 33).

should be closely connected to the society in which it exists. The goal was
to be more attentive to the roles cultural institutions of this type should
play for their communities.

In 1976, UNESCO organized a conference in Venice at which a group
of experts suggested the creation of a committee charged with facilitating
the return or restitution of heritage objects. On June 7, 1978, the Sene-
galese Amadou Makhtar Mbow, director of UNESCO, delivered a mem-
orable speech calling “for the return of irreplaceable cultural heritage to
its creators.” A few months later in Paris (October 24–November 28),
during its Twentieth General Conference, UNESCO passed resolution 20
C4/7.6/5, creating an “Intergovernmental Committee for Promoting the
Return of Cultural Property to Its Countries of Origin or Its Restitu-
tion in Case of Illicit Appropriation.” ICOM was also commissioned to
prepare a study on the restitution or return of property lost in the course
of colonization or foreign occupation, enumerating the primary obstacles
and proposing solutions.

Though it came out in favor of restitution, the ICOM study expressed
three reservations. Erste, it warned against a possibly excessive focus on
objects currently acknowledged to be masterworks; this appreciation
could be ill-defined and transitory, based all too often on market value
rather than cultural significance (ICOM 1979: 2, Punkt 12). Then it
called the practice of attributing particular objects to particular cultures
into question, noting the existence of certain important works reused
by successive cultures in ways that made it difficult to identify them
with only one. This was the case, Zum Beispiel, with “Roman obelisks, oder
Chinese vases reused by artists in the eighteenth century, or even the
profound influence of African art on the pictorial techniques of the twen-
tieth century” (ICOM 1979: 2, Punkt 12). Endlich, the report asserted that
denationalizations of this sort could be compounded by deterritorializa-
tion if the borders of an object’s country of origin had changed over time.
Such was the complication that Alex Salmond, then chief of the Scottish

african arts consortium
• UCLA • Rhodes University • University University of Florida • University of North Carolina at Chapel Hill •

CONSORTIUM EDITORS

DEPARTMENTAL EDITORS

UCLA
Marla C. Berns, UCLA
Erica Jones, UCLA
Peri Klemm, Cal State Northridge
Patrick A. Polk, UCLA
Allen F. Roberts, UCLA

Rhodes University
Rachel Baasch, Rhodes University
Steven Foloaranmi, Obafemi Awolowo University
Angelo Kakande, Makarere University
Emi Koide, Universidade Federal do Recôncavo da Bahia
Ruth Simbao, Rhodes University

University of Florida
Susan Cooksey, University of Florida
Rebecca M. Groß, University of Florida
Fiona Mc Laughlin, University of Florida
Robin Poynor, University of Florida
MacKenzie Moon Ryan, Rollins College

University of North Carolina Chapel Hill
Carol Magee, University of North Carolina at Chapel Hill
David G. Pier, University of North Carolina at Chapel Hill
Victoria L. Ebenen, University of North Carolina at Chapel Hill
Lisa Homann, University of North Carolina at Charlotte
Priscilla Layne, University of North Carolina at Chapel Hill

dialogue editor
Sidney Littlefield Kasfir

book review editor
Heather Shirey

exhibition review editor, north america
Elizabeth Perrill

exhibition review editor, global
Dunja Hersak

photo essay editor
Christraud M. Geary

CONSULTING EDITORS
Rowland Abiodun
Mary Jo Arnoldi
Kathleen Bickford Berzock
Suzanne Preston Blier
Elisabeth L. Cameron
Christa Clarke
Henry John Drewal
William Hart
Shannen Hill
Bennetta Jules-Rosette
Christine Mullen Kreamer
Alisa LaGamma
Constantine Petridis
John Picton
Doran H. Ross
Dana Rush

African Arts (ISSN 0001-9933 print, 1937-2108 online) is published
quarterly by the University of California, Los Angeles, CA 90095-
1310, in spring, Sommer, autumn, and winter. For editorial infor-
mation consult our websites at http://www.international.ucla.edu/
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african arts presents original research and critical discourse on traditional, contemporary, and popular African arts and expressive cultures. Seit 1967, the journal has reflected the dynamism and diversity of several
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Le contexte historique des années 1970 traduit une configuration psy-
chique et institutionnelle peu réceptive aux restitutions. Néanmoins, ce
premier processus a servi de cadre global à plusieurs demandes de resti-
tution du patrimoine. Au cours de ces dernières années, les réclamations
épisodiques des états africains se sont intensifiées. Elles ont cristallisé
un débat parfois passionné qui mettait en scène le patrimoine dans la
construction de l’unité des pays. C’est à la suite de cette chronologie que
s’inscrit le discours du 28 novembre 2017 (Université de Ouagadougou,
Burkina Faso) du président français Emmanuel Macron. Le rapport
commandé par ce dernier, et rédigé par l’intellectuel et économiste séné-
galais Felwine Sarr avec l’historienne de l’art Bénédicte Savoy, prend en
considération les transformations intervenues ces dernières années entre
l’Afrique et le reste du monde. En réclamant le droit d’accès à ces produc-
tions qui forgent la mémoire collective, il reflète une prise de conscience
réelle devant l’histoire pour que cette dernière ne reste pas une colonie.
Si la restitution est soulevée, une deuxième fois, à une échelle interna-
tionale, elle a changé sous trois aspects. D’abord, ce n’est plus une institu-
tion qui est sollicitée pour faire un rapport sur le sujet. Confier ce projet
à une institution n’aurait certainement pas permis d’accéder à ce type de
résultat. Il s’agit d’abord de la libération d’une parole dépourvue de tout
calcul institutionnel ou politique et sans aucune aliénation psychologique
par rapport à une quelconque hiérarchie. Ensuite, il s’agit de non profes-
sionnels des musées, ce qui a l’avantage de sortir de la routine des termes
convenus et des schémas de références déjà connus. Enfin l’analyse des
problèmes conserve une épaisseur scientifique nourrie par les archives de
l’histoire et par la manière de représenter les défis majeurs auxquels les
musées sont confrontés de nos jours.

LES ENJEUX DE LA RESTITUTION
Il faut regretter que les questions soulevées par le public n’aient guère
évolué. Nous sommes revenus sur les mêmes thèmes relatifs à la capacité
des musées africains à accueillir les objets ou sur leur sécurité et leur
sureté. Or, si les musées africains ne sont pas sans doute les seuls endroits
où des objets disparaissent, la nouvelle configuration globale mérite d’être
étudiée à l’aune des changements entre l’Afrique et l’Europe. Contraire-
ment au contexte des années 1970, cette controverse est articulée dans
un nouveau cadre africain où plusieurs institutions ont été construites ou
sont en projet de construction. Au Sénégal le récent musée des Civilisa-
tions noires offre toutes les opportunités d’un musée moderne et profes-
sionnel, tandis que le Bénin porte le projet de construction de nouveaux
musées pour booster son tourisme culturel. A côté de ces initiatives, d’an-
ciennes institutions se repensent, à l’instar du Musée Théodore Monod
d’art africain de l’IFAN Ch. A. Diop. Celui-ci opère une relecture de ses
collections en privilégiant un dialogue avec l’art contemporain. Il s’agit
d’une redéfinition du savoir et de l’héritage d’une collection d’art africain
dans le contexte d’une Afrique du XXIe siècle.

En Europe, c’est une nouvelle remise en question du statut, du rôle et
de la nature des musées ethnographiques hérités d’un lourd passé colo-
nial. Si la déclaration pour les musées universels1 a été rédigée en partie
pour servir de protection contre les relents de restitution, elle s’est accom-
pagné de vastes rénovations des musées à fort potentiel ethnologique. En
Allemagne, le Humboldt Forum dont la rénovation est supervisée par le
Prussian Cultural Heritage Foundation, compte ouvrir dans le courant de
l’année 2019 avec une nouvelle visualité proposée par l’architecte italien
Franco Stella (vgl. Parzinger 2016). Tirant son nom de Wilhelm et Alexan-
der Von Humboldt, ce lieu mythique avec sa façade baroque, souhaite
être un lieu d’expérimentation, d’apprentissage, de réflexion et de regard
vers le futur.2

En Belgique, le musée royal d’Afrique centrale de Tervuren qui
s’appelle désormais Africa Museum a rouvert ses portes le 8 décembre
2018 en exposant une vision décoloniale de ses collections. En France, le
Musée du Quai Branly a servi de catalyseur en s’affichant comme le lieu
«où dialoguent les cultures». Dans un article que James Clifford consacre
au musée dans la revue October du printemps 2007, l’anthropologue re-
vient sur cette devise. Il prévient que les modalités de ce dialogue relèvent

4 | african arts AUTUMN 2019 VOL. 52, NEIN. 3

National Party, confronted when he considered asking for the return
of the Lewis chess pieces from the British Museum: they were made in
Norwegen, but found in a dig at Uig Bay, on the Isle of Lewis in the Scottish
Outer Hebrides (Thomas 2016: 33).

The historical context of the 1970s thus revealed a psychological and

institutional configuration resistant to the idea of restitution. Never-
theless, these first steps provided a global framework in which multiple
claims have been made. During the last several years, calls for restitution
by African nations have intensified, crystallizing a sometimes passion-
ate debate that emphasizes the role of heritage in constructing national
unity. President Emmanuel Macron’s speech of November 28, 2017 bei
the Université de Ouagadougou fits into this chronology. The report he
commissioned, written by Senegalese intellectual and economist Felwine
Sarr with art historian Bénédicte Savoy, addresses the transformations in
Africa’s relations with the rest of the world that have occurred in recent
Jahre. By claiming the right of access to these creations that shape collec-
tive memory, it marks the advent of a new consciousness of the past, A
decolonization of history.

The question of restitution has thus emerged for a second time as a
topic of international discussion, but has changed in three ways. Erste,
it is no longer a matter of institutions being commissioned to prepare
reports on the subject. It is instead a liberation of speech stripped of
all institutional or political calculation, free of psychological alienation
deriving from any kind of hierarchical relation. Zweite, it involves
people who are not museum professionals and have the advantage of
being able to escape the routine of conventional terms and familiar
frames of reference. Endlich, the analysis of the problems involved has a
new intellectual richness conferred by attention to archival evidence and
a methodologically sophisticated approach to the major challenges that
confront museums today.

THE STAKES OF RESTITUTION
Bedauerlicherweise, the public continues to raise the same old questions.

We have returned to a familiar theme: doubts about the capacity of
African museums to care for objects or guarantee their security. Seit
African museums are certainly not the only places where objects disap-
pear, the new global situation is worth considering in light of changes in
both Africa and Europe. The current controversy over restitution, nicht wie
the one that occurred in the 1970s, is taking place in a new African
context in which multiple institutions have been built or are under con-
struction. In Senegal, the recently opened Musée des civilisations noires
provides all the benefits of a modern and professional museum, while
the Republic of Benin is undertaking the construction of new museums
to boost cultural tourism. Alongside these initiatives, old institutions are
rethinking their approaches. The Musée Théodore Monod d’art africain
de l’IFAN Ch. A. Diop, Zum Beispiel, has endeavored to reinterpret its
collections by privileging a dialogue with contemporary art. The goal
is to redefine the legacy of a collection of African art in the context of a
twenty-first century Africa.

In Europe, there is a new questioning of the status, role, and nature
of ethnographic museums burdened with their colonial pasts. Though
the “Declaration on the Importance and Value of Universal Museums”1
was written in part to serve as protection against restitution claims, es hat
nevertheless helped inspire vast museum renovations with considerable
ethnological potential. In Deutschland, the Humboldt Forum, konstruiert
under the supervision of the Prussian Cultural Heritage Foundation, Ist
projected to open in 2019 in a visually striking building designed by the
Italian architect Franco Stella (see Parzinger 2016). Taking its name from
Wilhelm and Alexander von Humboldt, this historically significant site,
with its baroque façade, has been conceived as a place of experimenta-
tion, learning, reflection, and contemplation of the future.2

In Belgium, the Royal Museum of Central Africa at Tervuren, Jetzt
known as the Africa Museum, reopened its doors on December 8, 2018,
to present a decolonized vision of its collections. In France, the Musée
du Quai Branly has served as a catalyst by proclaiming itself “the place

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d’un autre ordre. Quelles langues parler? En supposant quelle épistémo-
logie? D’après quel agenda politique? Avec quel degré d’autorité? Au nom
de qui? (Clifford 2007: 4).

Ces musées européens sont dans la sphère de ce qu’Anthony Smith
nomme «l’ethno-symbolisme».3 L’impression est ainsi donnée que ce pa-
trimoine venu d’ailleurs a du mal à s’intégrer au sein des institutions qui
les accueillent. Les questions mémorielles qu’il cristallise entre histoire
et politique se situent dans les multiples difficultés à penser une diversité
culturelle des états européens en proie avec une mémoire coloniale. Les
interrogations que soulèvent ces musées se posent sous différents angles
: comment le patrimoine historique national doit nouer des liens avec
l’histoire coloniale? Sous quel mode le passé de l’état-nation se connecte-
t-il à l’histoire du temps présent? Que doit être le discours d’une politique
culturelle dans un état multiethnique? Toutes ces discussions tournent
autour de la manière dont le patrimoine est partagé et comment
construire ce que le rapport Felwine/Savoy (2018) nomme «une nouvelle
éthique relationnelle».

La restitution favorise une reconsidération des rapports entre états
africains et européens à travers les biens culturels. D’une part, les états
africains vont mieux attacher une importance aux politiques muséales
en dotant leurs institutions de moyens adéquats. En outre, ce débat
encourage une réelle prise de conscience du patrimoine et son impact
sur la société. D’autre part, cela permet aux états donneurs et aux états
receveurs de mieux redéfinir les termes de leur diplomatie culturelle.
Toutefois, pour que ces nouvelles relations fonctionnent, il faut préciser
qu’il n’a jamais été question pour les conservateurs africains de militer
pour un retour total des biens culturels se trouvant dans les musées euro-
péens. C’est une situation qui n’est pas intéressante en soit, car les objets
sont aussi des ambassadeurs.

Cependant, on doit concevoir le retour d’un patrimoine jugé majeur
par les concernés. Ces objets, légués par les anciens, aident à construire
une mémoire collective, témoignent de la personnalité profonde des
peuples et forgent une identité nationale. Ils permettent aux sociétés de
s’identifier, de se recréer, facilitent la compréhension des racines et de la
Kultur, éclairent l’histoire de l’art et enrichissent la diversité créatrice des
artisans. Les biens culturels sont des objets est plus que prégnantes dans
notre vie de sorte qu’il est légitime de se poser la question «du droit des
objets à disposer d’eux-mêmes.»4 Cette personnification des objets qui
passe par plusieurs attributs garde toute sa légitimité dans le contexte
d’une époque où le patrimoine est perçu à travers une nouvelle lecture.
Il s’agit d’une adoration moderne du patrimoine différente certes de celle
issue des rituels et des cultes, ou de la dévotion des reliques et des objets
sacrés que l’idolâtrie des fidèles avait instituée de sorte que «la vénération
fonde ainsi le patrimoine» (Babelon et Chastel 1994: 17).

Au cours du débat sur la restitution, ces biens culturels ont été souvent

évoqués à travers la mention œuvre d’art. Ce qui a pour conséquence
de fausser les termes du débat, dans la mesure où il conduit certains
acteurs à rejeter ce patrimoine pour la simple raison qu’il est issu de
l’histoire d’un goût esthétique occidental et par conséquent ne mérite
plus d’être considéré comme un patrimoine africain. Or, «L’œuvre d’art
est en premier lieu le résultat de l’action de l’homme et si, en tant que
telle, sa reconnaissance ne doit pas dépendre des alternances du goût et
de la mode, les considérations historiques doivent toutefois précéder les
considérations esthétiques» (Brandi 2001: 52). Aujourd’hui, ces objets
sont instrumentalisés dans les processus de revendications sur le terreau
duquel s’est construit un lobby anti-restitution signalé par Felwine Sarr.5
Même l’UNESCO contourne la question de la restitution à l’occasion de
la rencontre qu’il organise le 1er juin 2018 en insistant davantage sur une
«Circulation des biens culturels et Patrimoine en partage» que sur la res-
titution du patrimoine. Si la volonté politique est sincère, la restitution est
possible car le droit est plastique. Mais est-ce que cette question survivra
au mandat du président d’Emmanuel Macron?

where cultures dialogue.” In an article published in the journal October in
der Frühling von 2007, anthropologist James Clifford critiqued this motto. Er
noted that the concept of dialogue raised a range of unsettling questions.
Dialogue in what language? Based on what epistemology? According to
what political agenda? With what degree of authority? In whose name?
(Clifford 2007: 4).

The approaches of these European museums are examples of what
Anthony Smith calls “ethno-symbolism.”3 They convey an impression
that all this heritage from elsewhere has trouble fitting into the institu-
tional frameworks that currently contain it. This situation crystallizes
various historical and political questions of memory and implicates the
multiple difficulties faced by European states contending with colonial
legacies as they try to envision cultural diversity. In consequence, diese
museums raise a variety of questions: how should national heritage be
linked to colonial history? In what manner should the development of
the nation-state over time be connected to the history of the present?
What is the appropriate discourse of cultural politics in a multi-ethnic
state? All these discussions derive from the problem of heritage, how it
is to be shared, and how one might construct what the Sarr-Savoy report
(2018) calls “a new relational ethics.”

Restitution provides an opportunity to reconsider the relation between

African and European states through cultural goods. Auf der einen Seite, Afri-
can states will ascribe more significance to museum policy by endowing
their institutions with adequate funds. This debate also dramatically
increases awareness of heritage and its impact on society. Auf dem anderen,
restitution will allow both donor and receiver states to better define the
terms of their cultural diplomacy. For these new relations to function,
it is important to specify that this has never been a matter of African
curators agitating for a total return of all cultural goods held in European
museums. This is a situation that is fundamentally undesirable, Weil
objects also serve as ambassadors.

Trotzdem, we must envisage the return of heritage objects judged
to be of major importance by those concerned. These objects, left by the
elders, help form collective memory, bear witness to the deep character
of peoples, and forge a national identity. They allow societies to identify
selbst, to enjoy themselves, to foster understanding of their roots
and culture, to shed light on the history of art and enrich the creative
diversity of artisans. Cultural goods are objects so profoundly imbued
with meaning that it is legitimate to suggest that there might be “a
right of objects to self-determination.”4 This personification of objects
is especially justified in the context of a historical moment in which
heritage is being seen through a new lens. It is a modern reverence for
heritage—one markedly different from the reverence associated with the
old beliefs and rituals or with the devotion to relics and sacred objects
that the idolatry of religious believers has instituted in such a way as to
create a situation in which “worship also establishes heritage” (Babelon
and Chastel 1994: 17).

In the debate on restitution, these cultural goods are often described
as works of art. This tendency distorts the terms of the debate, insofar as
it leads certain actors to reject this legacy for the simple reason that it is a
product of the history of Western taste and therefore should no longer be
considered a properly African heritage. Und doch, “the work of art is first
and foremost the result of the actions of man, and if as such, its recogni-
tion should not depend on the vicissitudes of taste and fashion, then his-
torical considerations must always take precedence over aesthetic ones”
(Brandi 2001: 52). Heute, these objects have been instrumentalized in
ways that have provoked the emergence of what Felwine Sarr has identi-
fied as an anti-restitution lobby.5 Even UNESCO dodged the question in
the conference it held on June 1, 2018, by emphasizing the “circulation of
cultural goods and shared heritage” over direct restitution. If the political
will is there, restitution is possible because the law is flexible. But will this
possibility survive President Emmanuel Macron’s term in office?

Notes
1
Der “Déclaration sur l’importance et la valeur des
musées universels,” a été rédigée en décembre 2002,

et signée par 19 des plus grands musées d’Europe et
d’Amérique du Nord / The “Declaration on the Impor-
tance and Value of Universal Museums” was drafted in

Dezember 2002, and signed by nineteen of the most
important museums in Europe and North America.
2 Humboldt Forum, August 2018, N°3, P. 3.

VOL. 52, NEIN. 3 HERBST 2019 afrikanische Kunst | 5

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3

„[E]thno-symbolists consider the cultural elements

3
of symbol, myth, Erinnerung, value, ritual and tradition
to be crucial to an analysis of ethnicity, nations and
nationalisms” (Schmied (2009: 25).
https://www.lexpress.fr/actualite/monde/
4
afrique/felwine-sarr-le-poids-de-l-impense-colo-
nial_2058754.html
2 Bénédicte Savoy organized a symposium with this
title at the Collège de France on June 21, 2018. See “Du
droit des objets (à disposer d’eux-mêmes?),” https://
www.college-de-france.fr/site/benedicte-savoy/sympo-
sium-2017-2018.htm.

References cited
Babelon, J.-P., et Chastel, André. 1994. La notion de
patrimoine. Paris: Editions Liana Levi.

first word

Restitution and the Logic of the
Postcolonial Nation-State

John Warne Monroe

It is no accident that so many accounts
of the dramatic new turn restitution policy
has taken in Europe begin with a mention
of French president Emmanuel Macron’s
now-famous November 28, 2017, remarks in
Ouagadougou, where he called for “the tempo-
rary or definitive restitution of African cultural
heritage to Africa.” Like the Tennis Court Oath
von 1789, this was a rhetorical gesture self-con-
sciously made for History with a capital H: In
one single statement, Macron drew a sharp
line between the Old Regime of cultural policy
and the new. As recently as August 2016,
the French state had steadfastly resisted calls
from the Republic of Benin to return objects
plundered during the Second Franco-Daho-
mean war (1892–1894); a bit more than a year
später, the Elysée Palace Twitter feed reinforced
Macron’s statements with the triumphant dec-
laration that “African heritage can no longer

John Warne Monroe is a historian of
modern Europe at Iowa State University.
He examines the places where the borders
of “Europe” become porous: moments of
cultural contact and commercial exchange
that force us to question what this thing “the
West” is and how it has come to be defined.
His current research focuses on France and
its African colonies between about 1880 Und
1940; his book based on this work, Metro-
politan Fetish: African Sculpture and the
Imperial French Invention of Primitive Art,
was published in September 2019. jmonroe@
iastate.edu

6 | african arts AUTUMN 2019 VOL. 52, NEIN. 3

Brandi, Cesare. 2001. Théorie de la restauration. Paris:
INP. Centre des monuments historiques.

Clifford. James. 2007. “Quai Branly in Process.” Oktober
120 (Frühling): 3–23.

ICOM. 1979. “Etude, réalisée par l’ICOM, relative aux
principes, conditions et moyens de la restitution ou du
retour des biens culturels en vue de la reconstitution des
patrimoines dispersés.Museums 31 (1): 62–66.

Mairesse, Francois. 2000. “La belle histoire, aux origines
de la nouvelle muséologie.” In André Desvallées (Hrsg.),
L’écomusée: Rêve ou réalité, special issue of Publics et
Musées 17–18: 42.

Ndiaye, Malick (Hrsg.). 2007. Réinventer les musées. Paris:
Africultures.

remain a prisoner of European Museums”
(Saar and Savoy 2018: 1).

Macron’s grand gesture was not simply a
matter of objects. In the official advisory report
prepared at his request after this declaration,
Felwine Sarr and Bénédicte Savoy noted that
the French president’s proclamation “was in-
scribed within a much more general approach
toward the emancipation of memory”—by
which they meant that it was part of a broader
effort to come to terms with France’s past as an
imperial power (Sarr and Savoy 2018: 1). Seit
decolonization, metropolitan French political
life has been marked by a strong tendency to
minimize the violence and grotesque inequity
of nineteenth and twentieth century imperial-
ism. As recently as 2005, the French National
Assembly overwhelmingly supported a law
mandating that school curricula “recognize
in particular the positive role of the French
presence overseas” (Price 2007: 41). When it
comes to the presentation of objects in French
national museums, as Sally Price has incisively
observed, this reluctance to face the colonial
past in all its brutal specificity has promoted
a mixture of universalizing aestheticism and
cultural contextualization that censors the
facts of colonial domination in order to evoke
a “1950s-style ethnographic present” (Price
2007: 174.) Macron’s stance is very different.
Rather than obscuring the realities of conquest
in a haze of ahistorical primitivist fantasy,
he has explicitly called colonization “a crime
against humanity, a true example of barba-
rism.” Where his predecessors congratulated
themselves for imagining France’s interactions
with its former colonies as a “dialogue” among
equals, Macron has instead proposed to take
France down a peg by “earnestly apologizing to
those toward whom we have committed these
acts” (Sarr and Savoy 2018: 2).

Macron is clearly aiming for a self-conscious

break with the past, an effort to establish
French national identity on terms better suited
to the present reality of a globalized world—
though it is true that he has remained oddly
silent about the heritage of far-flung territo-
ries still under French control, such as New
Caledonia. Inconsistent as it may have been,
Macron’s declaration seems to have triggered

Parzinger, Hermann. 2016. “Remodeling Shared
Heritage and Collections Access: The Museum Island
Constellation and Humboldt Forum Project in Berlin.”
In Bernice L. Murphy (Hrsg.), Museums, Ethics and Cultu-
ral Heritage. London: Routledge and ICOM.

Sarr, Felwine, et Bénédicte Savoy. 2018. Rapport sur
la restitution du patrimoine culturel. Vers une nouvelle
éthique relationnelle. Paris: Minstère de la Culture.

Schmied, Anthony. 2009. Ethno-symbolism and Nationa-
lism: A Cultural Approach. New York: Routledge.

Thomas, Nicholas. 2016. The Return of Curiosity: Was
Museums Are Good for in the 21st Century. London:
Reaction Books.

something: in response, other former colonial
powers have revived and intensified their own
discussions about what to do with the African
heritage objects in their national museums.
The possibility of restitution, previously a sub-
ject more theoretical than practical, has begun
to look like it might become a fait accompli. In-
creasingly the issue is not whether historically
significant objects of African heritage should
be returned, but rather when, Wie, and under
what conditions.

Gleichzeitig, Jedoch, archival
evidence reveals a telling mixture of conti-
nuity and discontinuity that is important to
acknowledge if we are going to understand the
full ramifications of this incipient new phase in
the lives of certain historically significant Af-
rican objects held for the time being in French
and other national collections. When these
objects return, they will function in a context
dramatically changed by the postcolonial
emergence of the nation-state as the primary
unit of political organization in Africa. Als
solch, they will afford scholars opportunities to
pose new questions and reassess old paradigms
of interpretation.

Surprisingly enough, this is not the first

time the French government has taken
measures to ensure that a number of African
objects deemed culturally important remain
on the continent. So früh wie 1921, administra-
tors in Dakar, capital of the colonial federation
of French West Africa (Afrique Occidentale
Française, AOF), began discussing the pos-
sibility of creating a museum in the city that
would house a mixture of ethnographic objects
and natural-historical specimens. These early
conversations took place in the context of a
broader shift in French colonial governance. In
the face of growing unrest, as it became clear
among Africans that their military service in
World War I would not be rewarded with new
rights, a number of colonial administrators
were drawn to what historian Raoul Girardet
(2005: 268) describes as “colonial humanism,”
an ideological conception of empire that, sogar
as it privileged the epistemological position of
the West, viewed the cultural difference of the
colonized as a form of richness to be under-
stood in ethnographic terms, rather than a

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